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"AUBERJONOIS - SOUTTER. LES CANDEURS PEMIÈRES"

"AUBERJONOIS - SOUTTER. LES CANDEURS PEMIÈRES"

13.11.2022 Exposition Musée cantonal des Beaux-Arts, Plateforme 10, Lausanne, jusqu'au 8 janvier 2023


Image: Louis Soutter (1871 - 1942), Glace d’argent, miroir d’ébène, 1938, Peinture au doigt. Encre noire et gouache rouge sur papier, 44 × 58,1 cm. Musée cantonal des Beaux-Arts. Acquisition, 1955 - Photo: MCBA

L’exposition présentée à l’Espace Focus rapproche deux artistes phares de la collection du MCBA. Elle confronte le destin des deux hommes, leur découvre des points communs et rapproche leurs œuvres dans l’hypothèse d’une quête partagée: celle d’un retour aux sources de l’art, du côté des candeurs premières.

Nés tous deux il y a 150 ans, l’un à Morges, l’autre à Lausanne, Louis Soutter et René Auberjonois sont deux virtuoses du dessin. Soutter c’est l’abandon des conventions, la nervosité sismographique, la fougue expressive; Auberjonois c’est le combat avec la norme académique, la retenue du geste, le trait longuement médité. D’un côté la maculature jusqu’à saturation de la feuille, de l’autre la trace légère, presque invisible sur le papier.

Si les artistes sont prompts à dénicher les œuvres qui s’harmonisent avec leur sensibilité et à entrer en communion avec elles, la reconnaissance précoce du génie de Soutter par Auberjonois ne manque pas d’étonner tant leurs esthétiques semblent aux antipodes. L’exposition puise dans la collection du MCBA qui comprend 181 œuvres de René Auberjonois, et 630 de Louis Soutter, les plus importants fonds de ces artistes en mains publiques.

Les premières œuvres d’Auberjonois balancent entre l’impressionnisme, des scènes de rue dans la suite de Théophile-Alexandre Steinlen, et un synthétisme influencé par les Nabis. Il développe ensuite une figuration austère et stylisée dans la digestion lente de l’œuvre de Paul Cézanne, du cubisme expressif et de la palette assourdie des anciens Fauves. Son évolution picturale sera de faible amplitude.

Bien que consacré figure majeure du modernisme en Suisse à partir des années 1920, Auberjonois estime très tôt que sa peinture est dans une impasse. Il est partagé entre deux élans qui marquent sa personnalité et que son ami Charles Ferdinand Ramuz a tôt repérés: "Vous êtes extrêmement raffiné et cultivé, c’est une de vos extrémités [...]. Nous avons en commun l’amour de ce qui est primordial et élémentaire; c’est l’autre de vos extrémités."

Partagé entre classicisme et primitivisme, Auberjonois ressent la nécessité de retrouver la fraîcheur des sensations premières. Pour se débarrasser du filtre de la formation académique, il s’inspire des peintres autodidactes, et en particulier du Douanier Rousseau. Mais aussi des décorateurs de baraques foraines, des images d’Épinal et de la tradition populaire des peintures sous verre. Autre chemin pour se libérer de l’académisme: la caricature, où il déverse son cynisme et son humour noir. Malgré toutes les solutions de simplification imaginées, seuls ses dessins parviennent à satisfaire son désir d’épuration; ses tableaux plongent dans l’obscurité à coups de retouches et de corrections des valeurs.

On comprend dès lors pourquoi Auberjonois est stupéfié par le tour de force de Soutter qui, ayant suivi lui aussi une formation artistique classique, se libère des recettes d’atelier après son internement en 1923. Alors qu’il avait été peu convaincu par les œuvres de jeunesse de son ami marquées par le réalisme et l’Art nouveau, Auberjonois admire sa rupture spectaculaire avec les langages artistiques contemporains, son inventivité formelle et sa production foisonnante. Il adhère à toutes les phases de son évolution: les dessins au crayon de la période des cahiers (1923 1930), les compositions à l’encre de Chine de la période maniériste (1930 1937), et les peintures au doigt qui renouent avec la couleur (1937 1942).

Auberjonois resserre ses liens avec Soutter au début des années 1930. Il lui rend visite à Ballaigues et il le reçoit dans son atelier lausannois. En février 1937, il organise une exposition de ses dessins à la galerie Vallotton, à Lausanne; il lui consacre un texte élogieux dans la "Gazette de Lausanne".

Après la mort de Soutter en 1942, il continue à défendre son œuvre. En 1945, il convainc Jean Dubuffet de lui consacrer un des premiers numéros des Cahiers de l’Art Brut; il écrit un nouveau texte et fait photographier une sélection de dessins. Le projet n’aboutira pas et le texte ne sera finalement publié qu’en 1948.

Le dernier combat d’Auberjonois en faveur de Soutter a lieu en 1955, après qu’il a constaté que l’œuvre de son ami est toujours ignoré. Âgé de 83 ans, il choisit une cinquantaine de dessins pour une exposition qui se tient sous son patronage à la galerie Vallotton. C’est en visitant cette exposition qu’Ernest Manganel, directeur du Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne, prend la décision d’acquérir pour la collection cinq œuvres de Soutter parmi celles sélectionnées par Auberjonois puis, l’année suivante, plus de 400 dessins.

En observant les dessins d’Auberjonois et de Soutter, on comprend ce qui les oppose et ce qui les rapproche dans leur retour à la simplicité: Auberjonois soustrait jusqu’à la disparition, Soutter additionne jusqu’à la saturation. Chez Auberjonois, le trait léger, sensible et frémissant, est déposé au crayon tendre, puis repris, gommé et estompé jusqu’à ne laisser survivre qu’une trace, toujours menacée d’être absorbée par le papier. Chez Soutter, le crayon griffe et hachure avec rapidité et violence; la plume court, se ravise, et repart affranchie de sa première pensée; les doigts chargés d’encre balisent et estampillent l’espace.

Les dessins d’Auberjonois testent des manières différentes, tendues ou relâchées; ils sont ouverts à l’aventure de la feuille blanche, du centre vers les bords jamais atteints. Soutter bâtit des murailles compactes derrière lesquelles transparaît la lumière virginale de ses supports; qu’ils soient quadrillés, lignés ou vierges, ces écrans de projection lui suggèrent des formes qui s’engendrent et se conjuguent avec une liberté déconcertante.

Auberjonois encourage la rébellion contre l’ordre social, prône la fraternité avec les humbles, l’affection pour les bêtes et la bienveillance pour ce qui, en l’homme civilisé, subsiste de l’animal. Soutter transforme la nature en miroir de ses émotions, pleure la déchéance des exclus, et crie la douleur des âmes errantes.

Tous deux ont en commun une empathie profonde avec le spectacle du monde.

cp

Commissaire de l’exposition: Catherine Lepdor, conservatrice en chef

Contact:

https://www.mcba.ch/plateforme-10/

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